Hécate, Déesse de la Lune et le cycle de Vie/Mort/Vie au temps du confinement et du Covid-19 - Opus 2

Hécate, Déesse de la Lune et le cycle de Vie/Mort/Vie au temps du confinement et du Covid-19 - Opus 2

Hécate, le cycle vie/mort/vie et la croisée des chemins - Opus 2

Réflexions sur la Présence de la Déesse et du Sacré dans la Cité 

Mythes et traditions au chevet de la planète 

 

Hécate 

 

La Déesse dans la cité et le cycle de Vie/Mort/Renaissance

Envisageons la vie comme un processus continu dont toutes les polarités sont réconciliées, à savoir dans un dialogue permanent. 

La notion de cycle est ici fondamentale. La Nature nous initie aux trois visages de la Déesse. Chacun de ces aspects se retrouve dans le cycle naturel de vie/mort/renaissance.

En Occident, elles se nomment Artémis (la créatrice), Séléné (la préservatrice), Hécate (la destructrice). En Inde, Elle est Shakti, Karuna, Kali

L’esprit de la déesse, tel que son message nous parvient aujourd’hui par l’étude des mythes, crée, préserve et détruit. Sa danse est mouvement et changement.

La Déesse est présente dans la cité aujourd’hui. Elle y est présente dans toutes ses manifestations. Cependant, nous avons du mal à considérer son aspect destructeur en tant qu’Hécate.

Hécate est une déesse associée aux Enfers et aux morts. Elle est la déesse des carrefours et de la croisée des chemins. En effet, selon les Grecs, les carrefours sont des sortes de portails reliant les Enfers, la terre et le ciel. Nous craignons fondamentalement les présents qu’Hécate, alias Kali, nous fait : le vieillissement, la détérioration, la dégénérescence et la mort, alors qu’elle est l’alchimiste qui connaît et trouve les graines d’une nouvelle vie dans le compost des formes qui se désagrègent. Nous en avons peur et nous la fuyons. Ce faisant, nous nous rendons aveugles à ce qu’il y a de sacré en elle.

 

Une gare en France.

Je suis devant une borne libre-service et prends mon billet pour préparer mon voyage. À côté de moi, un homme échevelé prend également un billet sur une autre borne. Il mange un croissant et gesticule dans tous les sens. Comme il parle en même temps qu’il vocifère ses propos, il offre des morceaux de viennoiserie à l’air environnant. Il parle autant à la machine qu’à des invités invisibles. Le sol reçoit ses offrandes de nourriture. Une vieille femme près de moi demande : « Que fait-il ? Il donne à manger à des fantômes ? »

Je souris, et derrière mon sourire, il y a de l'intérêt et une crainte diffuse à la fois, un désir de partir aussi. C’est comme si j’étais dans un rêve où des évènements étranges se déroulaient. Mais dans mon cœur, une voix murmure, « Reste avec ça, écoute, car ce que tu vois est sacré. » 

Mais qu’y a-t-il de sacré chez un lunatique nourrissant l’air avec des morceaux de croissants et parlant aux fantômes comme s’il les récriminait de quelque chose. Cette voix me dit encore : « Il est une des parties de toi que tu crains le plus. »

Dans le train, je prends conscience que je suis confuse sur le sens de ce qui est saint ou sacré. J’ai été le témoin d’une scène qui semblait plutôt être une profanation du sacré ; pourtant une voix en moi me disait que cet homme était saint.

 

Le sacré, le saint et le laid 

En y réfléchissant, je décidai de regarder les définitions des mots « saint » et « sacré. » Le mot « saint » vient du latin sanctus qui veut dire pur, souverainement parfait, bienheureux... et vient également de sancire qui veut dire « vouer aux Dieux », vénéré, inspiré par l’amour de Dieu...

Le terme « sacré » vient du latin sacrer qui signifie 'ce qui concerne la religion' ou qui a pour objet le culte des dieux, ce qui est vénéré, fameux. 

Les deux termes renvoient à 'ce qui est consacré au service ou à l ‘adoration d’une déité'. Bien sûr, ils renvoient tous deux également par opposition à ce qui est profane, ce qui était le cas de la situation rencontrée, l’homme au croissant.

Dans le cours de ma réflexion, j’ai mis en doute mon attachement à l’état de sainteté comme ayant à voir avec quelque chose de beau. Je n’avais jamais considéré que l’état de sainteté puisse inclure le côté plus obscur de la vie, ou ce que nous considérons comme « laid » ou déviant. Je ne pouvais que remarquer que ma pensée conditionnée était duelle. Mon paradigme culturel était construit sur une vision exclusive, ce que nous apprend la culture occidentale.

Nous avons été habitué.e.s à croire qu’il y a des pensées ou croyances vraies et d’autres qui ne le sont pas, qu’il y a le bon et le mauvais, la beauté et la laideur. Nous sommes domestiqués à croire qu’il vaut mieux avoir raison, être bon et beau. Nous avons peur et généralement haïssons ce que la société considère comme faux, mauvais et laid. Tous ces termes sont le reflet d’une réalité socialement construite et partagée, et pourtant nous les utilisons comme s’ils reflétaient Une Vérité Absolue.

 

Hécate et la femme au chignon

Quand je vais en ville et marche le long de la Cathédrale, je vois souvent cette femme, petite et belle, revêtue d’un grand manteau, les cheveux grisonnants rassemblés en un chignon. Elle semble habitée à cet endroit même si je ne l’y croise pas à chaque fois. Elle se parle à elle-même ou reste silencieuse. Elle communique pour demander quelques pièces, une cigarette. Elle est assise sur un muret, toujours au même endroit. Elle semble attendre... Elle agace les gens parce que c’est une mendiante dotée d’une certaine prestance ou d’un certain romantisme. Il y a là un paradoxe. La prestance, comme la beauté, est la voie royale de la réussite en termes d’attendus culturels.

Elle ne s’habille pas et ne fait pas son chignon pour un plan de carrière précis dans quelque entreprise dirigée par des hommes la plupart du temps. Elle ne répond pas au diktat de la société qui dit qu’elle devrait utiliser sa prestance, son élégance pour séduire les hommes. Elle n’est pas concernée par tout cela.

En cela, elle aussi est un aspect de Kali/Hécate. Elle m’oblige à regarder à mes croyances sur la beauté et la laideur. Elle me pousse à me questionner sur la façon dont mon corps devient l’objet d’une quête de séduction pour répondre aux attendus de la relation homme/femme. Avec l’Epée de Kali, elle tranche dans le cœur de cette vanité et exige, si je le veux bien, que je questionne mon attachement à mon corps et sa représentation vers un au-delà de la dualité beauté/laideur.

 

Hécate ou L’Épée de Kali en la Présence de Tokyo

Tous les matins pendant des années, mes enfants et moi-même sur le chemin de l’école croisions un mendiant, Tokyo. Tout ce qui lui appartenait était autour de lui : des couvertures sales, des sacs, des conserves, des bouteilles, des journaux et un petit transistor qui crachait du rock. Il vivait dans la saleté et l’alcoolisme et nous interpellait à tue-tête. Toutes ces années, je voyais les yeux des gens se détourner de lui quand ils l’approchaient. 

Au début, je faisais de même jusqu’à ce que je m’arrête et échange quelques mots quotidiennement avec lui. Il était la plupart du temps agréable et souriant, le regard hagard et flottant. Quand je le voyais, j’étais triste. Je pensais qu’Il ne devait pas vivre comme ça.  Et je pensais cela parce qu’il me rappelait la nature instable de la vie, alors même que nous sommes éduqués à construire de la sécurité. Il était l’incarnation de mes peurs les plus profondes, l’isolement et la maladie, voire la mort imminente.

Cet homme, à la réflexion, était aussi une incarnation d’Hécate/Kali. Il restait assis sur sa couverture et m’amenait à questionner ma vie.   Il a été un catalyseur de changement. Le jour où je ne l’ai plus vu et où l’on m’a dit qu’il avait été emmené par les urgences, il me forçat radicalement à faire face au spectre de la mort du fait de sa disparition qui résonna en moi comme une perte, puis en tant que mort de l’ego et mort physique.

Il m’a rappelé qu’il y a deux visages de la vie qui relèvent du profane et de la sainteté, du sacré et de la malédiction. Comme l’homme au croissant, Tokyo m’a forcée sur le long terme, chaque fois que je le croisais ici à regarder mes attachements, ma quête de sécurité, mes illusions et les exclusions qui me constituaient.

Et la vie qui s’en va… en l’absence de ce saint homme…L’Epée de Kali sur chacune de nos têtes.

 

Ou comment regarder avec lucidité la danse de la vie et de la mort ? 

 

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